Le jeudi 5 juin 2025 à Yamoussoukro, le Sénat à travers la Commission des affaires sociales et culturelles a approuvé à l’unanimité trois projets de lois majeurs relatifs à l’exercice de la profession pharmaceutique en Cote d’Ivoire. Depuis, cette adoption continue de susciter de vives inquiétudes au sein de la corporation dans le pays. Ce dimanche 08 juin 2025, lors d’une conférence de presse tenue dans ses locaux, l’Autorité Ivoirienne de Régulation Pharmaceutique (AIRP), a rassurer les Ivoiriens et autres parties prenantes sur les objectifs des textes en question.
La réforme porte sur la révision des articles 13 et 14 de la loi n° 533-2015 relative à l’exercice de la pharmacie. Elle vise à lever les obstacles juridiques à la libre circulation et à l’établissement des pharmaciens dans l’espace UEMOA, conformément aux engagements communautaires.
Pour Dr. COULIBALY, la mesure n’est pas nouvelle. Il a rappelé qu’il était devenu nécessaire pour la Côte d’Ivoire, moteur économique de la sous-région, d’harmoniser ses textes à l’instar des autres pays membres comme le Sénégal, le Mali, le Bénin ou le Burkina Faso.
« Elle date de 2008, et avait été déjà transposée partiellement dans la loi de 2015. Le Ministère de la Santé, de l’Hygiène Publique et de la Couverture maladie universelle, n’a fait qu’à la remettre au goût du jour pour l’adapter aux recommandations formulées par l’UEMOA lors des dernières évolutions de sa mise en œuvre », a expliqué Dr. Assane COULIBALY, Directeur Général de l’AIRP.
Face aux craintes des professionnels du secteur, le Directeur Général de l’AIRP a rappelé que l’objectif recherché à travers cette mesure, est d’éviter toute concurrence déloyale, de protéger le monopole pharmaceutique et de maintenir un haut niveau de qualité des services dans le secteur.
« Le projet de révision de la loi adopté par le Sénat ne vise en aucun cas à défavoriser nos pharmaciens. Les procédures d’attribution de licences et de création de pharmacie resteront strictes et le cadre réglementaire demeurera exigeant », a-t-il rassuré.
La reforme menée ne touche pas que les officines de pharmacie. La formation, la recherche et le développement, la production, la distribution et la dispensation des médicaments sont aussi concernés. Pour le Dr. COULIBALY, la mesure va faciliter l’intégration du secteur pharmaceutique ivoirien à la dynamique régionale représente.
« La Côte d’Ivoire est aujourd’hui en passe de devenir un véritable hub pharmaceutique régional. Nous disposons du cadre le plus attractif pour les acteurs de la chaîne de valeurs pharmaceutiques. Aujourd’hui, toutes les multinationales veulent s’implanter en Côte d’Ivoire », a-t-il souligné avant d’ajouter que cette évolution permettra aux cadres ivoiriens de mieux s’insérer sur les marchés régionaux, tout en favorisant la mobilité des talents.
Dans un contexte ivoirien marqué par le renforcement de la Couverture Maladie Universelle (CMU), qui garantit une prise en charge des médicaments à hauteur de 70 % des médicaments conventionnés par la CMU, cette réforme vient à point nommé. « Le développement de la profession doit être vu comme un moteur. La demande en médicaments est en forte augmentation et nous souhaitons que les pharmaciens ivoiriens soient pleinement en mesure de répondre aux besoins nationaux », a affirmé le Directeur Général de l’AIRP.
Dans cette dynamique, le Dr. COULIBALY a annoncé le déploiement de missions de terrain par l’AIRP à travers le territoire national pour préparer l’installation de nouvelles officines dans les ’’déserts pharmaceutiques’’. « Nous avons un nombre important de pharmaciens qualifiés en attente d’installation. Il est crucial de les accompagner, particulièrement dans les zones éloignées où l’accès aux médicaments reste limité », a-t-il expliqué. Cette initiative permettra d’absorber ce vivier de professionnels tout en optimisant la mise en œuvre de la CMU.
L’AIRP travaille en collaboration avec les autorités locales pour assurer un maillage équilibré du réseau pharmaceutique. « Il ne s’agit pas seulement d’ouvrir des pharmacies, mais de construire un véritable service de proximité au bénéfice de tous les Ivoiriens », a souligné le Dr. COULIBALY.
Enfin, il a réaffirmé l’engagement de son institution à accompagner l’intégration sous régionale tout en veillant à la protection des intérêts des professionnels ivoiriens du secteur pharmaceutique.
« Ce n’est en rien une menace pour les acteurs de la pharmacie ivoirienne, bien au contraire. La véritable menace qui doit être prise en compte est celle du phénomène de la vente parallèle des médicaments dans les circuits illégaux ; s’agissant pour la plupart du temps de médicaments de qualités inférieurs ou falsifiés. Ce phénomène constitue d’ailleurs une concurrence déloyale pour le secteur pharmaceutique, et représente une véritable menace de santé publique et un danger pour nos populations. »
Au terme de son intervention face aux journalistes, le premier responsable de l’AIRP a profité pour adresser un message de sensibilisation à l’endroit des populations ivoiriennes, sur la nécessité d’acheter les médicaments et les produits de santé dans les circuits légaux que constituent les officines privées de pharmacie et les centres de santé publique qui sont les seules habilités à dispenser des médicaments.
Abdoulaye KABA